Comme chacun sait, à la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, Wernher von Braun et son équipe se sont rendus aux américains.
Ainsi que l’a caricaturalement résumé l’un des membres du groupe : « Nous méprisions les français, étions mortellement effrayés par les soviétiques, ne croyions pas que les britanniques puissent s’offrir nos services. Alors il ne restait que les Américains. »
Ce fut une décision tout à fait clairvoyante, comme le démontrera la suite des événements…
Devenu homme public, Wernher von Braun rencontrera moins d’hostilité liée au fait d’avoir développé des missiles à Peenemünde pendant la guerre, certainement parce que jusqu’en 1960 lui et son équipe feront exactement la même chose aux Etats-Unis, que celle d’avoir soi-disant opportunément changé de patrie.
Il y eut quelques manifestations sporadiques de petits groupes de pacifistes, tel celui qui a défilé devant le cinéma de Munich, où fut projeté en avant-première son film biographique « I aim at the stars » (« Je vise les étoiles » – « Ich greife nach den Sternen »), en brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire: « Diese Raketen ziehlen nicht auf die Sterne, sondern auf das Leben » : « Ces missiles ne visent pas les étoiles, mais la vie! »…
En revanche, beaucoup plus nombreux furent ceux qui raillèrent l’apparente facilité avec laquelle von Braun a changé de patrie, affirmant qu’il n’aurait sans doute aucun scrupule à refaire la même chose si cela devait servir ses ambitions.
Ainsi, alors que Wernher von Braun devait assister à un lancement important au Cap Canaveral, on prévient les journalistes qu’un empêchement de dernière minute ne lui permettra pas d’être présent… Un reporter, sans doute inspiré par la chanson de Tom Lehrer lança : « Qu’est-ce qui se passe, il ne veut pas interrompre ses cours de chinois ? »
A ses détracteurs Wernher von Braun répondait ceci : » Quelle est ma patrie ? Le domaine de mon père, qui est maintenant en Pologne ? La propriété de la famille von Braun en Prusse, qui fait maintenant partie de l’Union Soviétique ? Mes quartiers à Peenemünde, qui se trouvent maintenant à l’est ? Mon vrai chez-moi est devenu inaccessible… »
« Ma patrie est le monde » Sénèque