Apollo 9, Spider, Gumdrop et Red Rover

Pour la mission Apollo 9, la NASA a autorisé l’utilisation d’indicatifs, pour communiquer avec le centre de contrôle des missions. Une première depuis Gemini 3.

Il s’agit bien évidemment de pouvoir différencier les deux vaisseaux spatiaux, module de commande (CM) et le module lunaire (LM) qui voleront de concert dans l’espace.

Lorsque les trois astronautes sont dans le CM, l’indicatif utilisé est Apollo 9.

Il eut été pour le moins malaisé et impersonnel d’utiliser les numéros de série, en l’occurrence CSM-104 et LM-3.

Ou encore les identifiants COSPAR (Committee on Space Research) pour cette mission, 1969-018A pour le CM et 1969-018C pour le LM.

Le S-IVB étant répertorié 1969-018B et après la séparation des deux constituants du LM, l’étage de descente devient 1969-018D. Quel imbroglio !

Le choix de Spider s’explique aisément, le module lunaire ressemblant à une araignée à quatre pattes.

La plus belle, la plus poétique description du Module Lunaire nous vient de l’excellentissime pilote, journaliste, écrivain, Bernard Chabbert :

« … le LM était superbe : il ressemblait à une araignée qu’on aurait trempée dans un bain d’or en fusion et ensuite amenée chez un coiffeur fou qui se se serait d’abord amusé à lui tire-bouchonner une mèche par-ci et deux poils par-là, puis aurait formé des pâtés et des macarons et, après avoir bien laqué toutes ces excroissances, les aurait soigneusement recouvertes de très légères feuilles d’or et d’argent.

Les yeux de l’araignée se seraient retrouvés cachés derrière des lentilles de contact mordorées, et tout l’insecte soigneusement passé au vernis brillant. Puis on l’aurait posé sur quatre pattes largement écartées en croix, et les pattes se seraient à leur tour vues recouvertes d’or et finement haubanées, et au bout des pattes le décorateur aurait fixé des disques d’or fin. »

CHABBERT Bernard. l’homme FUSÉE. arthaud, 1982. 400 p. ISBN: 2-7003-0382-2. ET UNE NOUVELLE EDITION REVUE ET AUGMENTÉE A LIRE ABSOLUMENT ! editions privat, 2018. 514 p. isbn : 978-2-7089-9279-5.
« Spider » – Apollo 9

… Celui de Gumdrop (boule de gomme, plus précisément un bonbon en forme de cloche, de tronc de cône. Drop = goutte.) a été choisi de la même manière, la forme du module de commande s’apparentant à celle de certains bonbons très en vogue. (Dans le langage familier gumdrop s’emploie pour désigner une jolie fille.)

Egalement, car le CM est livré à la NASA, recouvert d’un film en Mylar (polytéréphtalate d’éthylène) de couleur bleu, destiné à préserver la fragile couche de Kapton aluminisé qui recouvre sa paroi extérieure fabriquée par la Gilmore Tilmen Schjeldahl Company.

Cette enveloppe protectrice ne doit être enlevée en totalité qu’avant la dépose du BPC (Boost Protective Cover), cette coque qui protège le module de commande lors du lancement, sur laquelle est installée la tour de sauvetage (Launch Escape Tower), équipée de trois moteurs à poudre, qui permet d’extraire le vaisseau spatial en cas de problème avec le lanceur.

Les célèbres bonbons en chocolat Hershey’s Kisses (photo ci-dessous) qui ont également une forme en tronc de cône, sont chacun emballés dans une fine feuille de papier aluminium.

Hershey’s Kisses. Bonbons en chocolat, en forme de goutte (drop), enveloppés par une feuille d’aluminium.
Le CSM Apollo 9 et la livrée bleue du module de commande.
Le CM Apollo 11 à l’usine de Downey de North American Rockwell le 8 août 1968, juste avant sa livraison au Centre Spatial Kennedy

L’indicatif de Russell Schweickart lorsqu’il effectue la première sortie spatiale du programme Apollo, en testant la combinaison spatiale A7L et son « système portable de support vie », celui là même que les astronautes porteront sur la Lune, est « Red Rover ».

Red car il est roux, un clin d’œil, et rover car tel le « vagabond », « l’itinérant », il est complètement autonome.

Lors de toutes les sorties spatiales précédentes l’astronaute était alimenté en oxygène par le vaisseau spatial.

Anecdote dans l’anecdote : James McDivitt a commandé la mission Gemini IV au cours de laquelle Edward White effectue la première sortie spatiale du programme Gemini. Accessoirement la première sortie extravéhiculaire américaine (EVA pour Extra-Vehicular Activity). Et la mission Apollo 9, qui permet à Russell Schweickart de réaliser la première sortie spatiale du programme Apollo.

Apollo 9, un rhume à 500 000 dollars

Le lancement de la mission Apollo 9 devait intervenir le vendredi 28 février, les astronautes ayant attrapé un rhume, ce dernier fut reporté au lundi 3 mars.

Le coût de ce report est estimé à 500 000 dollars pour une mission d’environ 340 millions de dollars. (Respectivement 3,44 millions et 2,34 milliards en dollars constants)

Ce surcoût est principalement lié aux heures supplémentaires payées aux équipes de lancement pendant le week-end, et aux trois jours supplémentaires de déploiement de la flotte de récupération qui comprend quelque 9 000 personnes, (7 navires de guerre, 18 avions…) répartis sur 4 zones autour du globe.

La NASA a déclaré qu’elle n’avait pas fait appel à l’équipage de réserve car Charles Conrad, Richard Gordon et Alan Bean avaient deux semaines d’entraînement de retard.

En effet lors des quinze derniers jours, James McDivitt, David Scott et Russell Schweickart, ont utilisé de manière exclusive les simulateurs reliés au centre de contrôle. Par ailleurs, le porte parole de la NASA a précisé, que seul un problème grave conduit au remplacement d’un membre d’équipage à ce stade du compte à rebours.

Le rythme cardiaque des astronautes d’ Apollo 9 au décollage

Quelque 11 minutes après le décollage, les astronautes d’ Apollo 9 sont en orbite autour de la Terre.

Le directeur de vol Eugene Kranz leur dit alors : « Nous sommes fiers de vous. Tout le monde ici est heureux comme un poisson dans l’eau. » (en anglais : « Everybody here is happy as a clam. »)

Russell Schweickart le « bleu », fut exceptionnellement calme lors du lancement, lorsque les médecins lisent son électrocardiographe, ils s’aperçoivent que sa fréquence cardiaque n’a jamais dépassé les 72 battements par minute, juste 10 battements au-dessus de sa fréquence normale.

Le cœur des deux vétérans, qui avaient déjà effectué un vol spatial, James McDivitt (Gemini IV) et David Scott (Gemini 8) battaient respectivement à 135 et 120 pulsations par minute !

C’est John Young qui détient le record de la fréquence cardiaque la plus basse, avec 70 battements lors de la mission Apollo 16, mais il s’agissait de son quatrième vol spatial.