Antonio Zarco, les stages de survie

Pour des motifs techniques liés en partie à leur situation géographique, les américains ont choisi l’amerrissage pour le retour sur Terre de leurs vaisseaux spatiaux, tout en envisageant bien évidemment la possibilité d’un retour inopiné sur la terre ferme, ce, dans les contrées les plus inhospitalières.

Ainsi l’entrainement des astronautes comprenait des stages de survie dans les divers environnements « hostiles » que l’on trouve sur notre planète, notamment les déserts qui représentent 30% des terres émergées, ou les forêts tropicales, environ 12% des terres émergées dans les années soixante.

L’US Air Force disposant d’une école de survie dans la jungle (Tropic Survival School), dirigée par Morgan Smith, qui faisait partie de la base aérienne Albrook* dans la zone du Canal de Panama.

C’est donc tout naturellement là-bas que les astronautes sont envoyés. Une session type dure 5 jours, une journée et demi pour les cours théoriques, trois jours en immersion dans la forêt, et une demi-journée consacrée au débriefing.

Lorsque les astronautes sont largués en pleine forêt en binômes (programme Gemini) ou en trinômes (programme Apollo), ils n’ont bien sûr aucun moyen de communication.

Sécurité oblige, chaque groupe est discrètement surveillé par deux moniteurs munis d’une radio pour donner l’alerte en cas de problème, et par des indiens Chocó (Emberá) dont le chef Antonio « Tony » Zarco l’un des consultants, était considéré par l’armée américaine comme le plus grand spécialiste au monde de la survie en milieu tropical.

Le Département de la Défense lui remettra sa Distinguished Public Service Medal, la plus haute distinction qu’un civil puisse recevoir du DoD, et la NASA son Silver Snoopy qui récompense toute personne ayant fait une contribution majeure dans le domaine de la sécurité.

En juin 1964 Antonio Zarco est invité par le gouvernement américain, il visitera notamment les centres spatiaux de la NASA ainsi que la capitale fédérale.

Antonio Zarco aux Etats-Unis

Les indiens Chocó pensent que les âmes des morts vont sur la Lune… Il est extrêmement émouvant de penser qu’ils ont connu les 12 Hommes ayant foulé leur astre sacré, et qui sont revenus sur Terre !

L’âme d’Antonio Zarco s’en est allée sur la Lune en 2010.

* La base Albrook a été fermée en 1997 en vertu des deux traités Torrijos–Carter signés en 1977 par le Président Jimmy Carter et le Général Omar Torrijos, qui donne au Panama la jouissance du canal à compter de 1999 alors qu’il était depuis 1903 sous contrôle américain.

Ernst Stuhlinger, l’homme au doigt d’or

La mise en orbite du premier satellite américain, Explorer 1, le 31 janvier 1958, quatre mois après Spoutnik 1 et trois mois après Spoutnik 2 et Laïka, a comporté quelques aspects primitifs. Ainsi la mise à feu du deuxième étage est commandée manuellement en appuyant sur un bouton. L’allumage du troisième et quatrième étage se fait automatiquement avec un minuteur.

Utilisant une règle à calcul et un chronomètre, Ernst Stuhlinger a passé des heures et des heures à calculer et recalculer le timing des événements en fonction de l’accélération du premier étage du lanceur « Juno I » et du moment précis où il atteindrait l’apogée de sa trajectoire après l’extinction du moteur. Déclencher la mise à feu du deuxième étage une seconde trop tôt ou une seconde trop tard provoquerait un lamentable échec. La responsabilité qui incombe à Stuhlinger est immense.

57 personnes se trouvent dans le blockhaus, situé à cent mètres du pas de tir n°26 des installations de l’US Air Force au Cap Canaveral, dont : le général John Médaris, responsable de la Army Ballistic Missile Agency qui emploie la Rocket Team de Wernher von Braun, Jack Fröhlich, directeur du projet Explorer au JPL, Kurt Debus et Hans Grüne, responsables des opérations de lancement.

William Pickering le directeur du JPL, Wernher von Braun, (à son grand désespoir, il aurait préféré rester au cœur de l’action), et James Van Allen, ont été priés de se rendre à Washington D.C.

Ernst Stuhlinger, lui, se trouve dans le Hangar D à 5 km de là, qui abrite l’essentiel des équipes de contrôle et de suivi.  Les données télémétriques, transmises à partir des accéléromètres installés à bord du lanceur, ainsi que des radars et du système DOVAP* (Doppler Velocity and Position) sont directement adressées vers sa console.

Stuhlinger aidé par un ordinateur analogique de sa conception, doit prendre la bonne décision à la seconde près. Le moteur du premier étage a fonctionné  2 minutes et 37 secondes.

C’est exactement 4 minutes et 20 secondes après l’extinction de ce dernier que Ernst Stuhlinger appuie sur le bouton qui déclenche la mise à feu des 11 moteurs à poudre Sergeant du deuxième étage.

La mission est un succès, les Etats-Unis sont dans l’espace, et il gagne ainsi son surnom de  « L’homme au doigt d’or ».

Stuhlinger l'homme au doigt d'or

Les principaux responsables du « projet Explorer » à la  Army Ballistic Missile Agency du Redstone Arsenal, Alabama, examinent un prototype d’Explorer I quelques jours avant son lancement. De g à d, (assis) Dr Eberhard Rees (1908 – 1998), General John B. Medaris (1902 – 1990), Dr Wernher von Braun (1912 – 1977), (debout), William Mrazek (1911 – 1992), Dr Walter Haeussermann (1914 – 2010) et Dr Ernst Stuhlinger (1913 – 2008)

Irmgard, sa femme, qui avait récemment accouché, lui dit : « OK, j’ai eu mon petit satellite, maintenant tu as le tiens !»

Ernst Stuhlinger et son épouse Irmgard, Hermann Oberth et son épouse Mathilde « Tilly »,  Wernher von Braun et sa femme Maria. (Scan : Patrick Roger-Ravilly)

Système développé par les allemands pour le suivi des fusées A4 depuis le sol.

Kurt Debus débordé

Le Dr Kurt Debus cumulait les fonctions de Directeur du Centre Spatial Kennedy, et de Directeur des Opérations de Lancement.

Le Centre devenant de plus en plus important, Kurt Debus nomme Rocco Petrone, « Director of Launch Operations »  en juillet 1966.