Pas d’alcool dans l’avion de la NASA ?

A ses débuts, la NASA utilisait un avion de ligne Convair CV-240, comme celui utilisé par John F. Kennedy pour sa campagne présidentielle, pour emmener rapidement ses collaborateurs aux réunions chez les contractants ou dans les différents centre spatiaux.

A bord de l’appareil il y avait un bar, contenant notamment des bouteilles d’alcool.

La première fois que James Webb, l’administrateur de la NASA, prend cet avion, le steward lui propose un verre. Dès son retour au siège de la NASA à Washington, Webb appelle Robert Seamans : « Venez me voir dans mon bureau, nous avons un problème à régler ».

Lorsque Seamans arrive dans son bureau, il lui dit de but en blanc : « Il faut supprimer l’alcool sur notre avion.

– Etes-vous contre le fait de boire un verre ?

– Non, mais nous pouvons nous attirer de gros problèmes si le Congrès apprend que nous servons de l’alcool dans cet avion. Comment est-il financé ?

– Vous n’avez pas payé votre consommation ?

– Il n’était pas question que je prenne un verre dans l’avion, d’où provient l’argent ?

– C’est un fond de roulement.

– D’accord, mais d’où provient la mise de départ ?

– Je n’en sais rien, je vous dirais ça demain ! »

Le lendemain, Seamans ayant mené sa petite enquête, donne l’explication  à Webb : « Ce service a été mis sur pied grâce au fond de caisse de la cafétéria de Langley, qui est subventionnée par l’état, mais les gens payent pour leurs consommations. »

– Il faut supprimer l’alcool de cet avion.

– Beaucoup de gens vont être mécontents !

– Ils seront encore plus contrariés si le Congrès nous tombe dessus, pour un truc aussi ridicule que ça. »

Lors de leur entrevue suivante, Seamans soumet une proposition  à  James Webb : « J’ai une idée, que penseriez-vous si nous mettions tous les deux une centaine de dollars pour approvisionner le bar de l’avion, il suffirait  alors de s’assurer que les consommations soient facturée au juste tarif pour que cette mise de fond se renouvelle perpétuellement. »

« D’accord, je m’en occupe ! »

Ainsi fut fait.

 

Les bâtiments de récupération des missions spatiales habitées

Dans l’Histoire des 31 premières missions spatiales américaines habitées (par Homo Sapiens), entre 1961 et 1975 (Mercury : 6, Gemini : 10, Apollo : 11, Skylab : 3, Apollo-Soyouz : 1), treize vaisseaux spatiaux n’ont pas été récupérés par un porte-avions.

En effet les missions Mercury-Atlas 6 (Friendship 7 – John Glenn) le 20 février 1962, et la mission Gemini 8 (Neil Armstrong et David Scott), qui s’est déroulée du 16 au 17 mars 1966 ont été récupérées par un destroyer. Respectivement, le USS Noa (DD-841), et le USS Leonard F. Mason (DD-852).

Une particularité pour la mission Mercury-Atlas 7 (Aurora 7 – Scott Carpenter), la capsule fut récupérée à la nuit tombante par le destroyer USS John R. Pierce (DD-753) mais Scott Carpenter fut emmené sur le porte-avions USS Intrepid (CV-11) par un de ses hélicoptères HSS-2.

Gemini 10 (John Young et Michael Collins) du 18 au 21 juillet 1966 a été récupéré par le navire d’assaut amphibie porte-hélicoptères, USS Guadalcanal (LPH-7). [Landing Platform Helicopter / Amphibious Assault Ship]

Gemini 11 (Charles Conrad – Richard Gordon) du 12 au 15 décembre 1966, a été récupérée par le navire d’assaut amphibie porte-hélicoptères, USS Guam (LPH-9)

Apollo 9 (James McDivitt, David Scott, Russell Schweickart) du 3 au 13 mars 1969 a été récupéré par le navire d’assaut amphibie porte-hélicoptères, USS Guadalcanal (LPH-7).

Apollo 10 (Thomas Stafford, John Young, Eugene Cernan) du 18 au 26 mai 1969 a été récupéré par le navire d’assaut amphibie porte-hélicoptères, USS Princeton (LPH-5).

Apollo 13 (James Lovell, John Swigert, Fred Haise) du 11 au 17 avril 1970 a été récupéré par le navire d’assaut amphibie porte-hélicoptères USS Iwo Jima (LPH-2)

Apollo 14 (Alan Shepard, Stuart Roosa, Edgar Mitchell) du 31 janvier au 9 février 1972 a été récupéré par le navire d’assaut amphibie porte-hélicoptères USS New Orleans (LPH-11)

Apollo 15 (David Scott, Alfred Worden, James Irwin) du 26 juillet au 7 août 1971 a été récupéré par le navire d’assaut amphibie porte-hélicoptères, USS Okinawa (LPH–3)

Skylab 3 (Alan Bean, Owen Garriott, Jack Lousma) du 28 juillet au 25 septembre 1973 a été récupéré par le navire d’assaut amphibie porte-hélicoptères, USS New Orleans (LPH-11)

Skylab 4 (Gerald Carr, Edward Gibson, William Pogue) du 16 novembre 1973 au 8 février 1974) a été récupéré par le navire d’assaut amphibie porte-hélicoptères, USS New Orleans (LPH-11)

Apollo-Soyouz (Thomas Stafford, Donald Slayton et Vance Brand) qui s’est déroulée du 15 au 24 juillet 1975, a également été récupéré par le navire d’assaut amphibie porte-hélicoptères, USS New Orleans (LPH-11)

Nous avons donc le nombre total de récupérations par type de bâtiment :

porte-avions : 18 ; destroyer : 3 ; navire d’assaut amphibie porte-hélicoptères : 10.

Le brassage des cultures au Centre Spatial Kennedy

En 1962, la Direction des Opérations de Lancements (Launch Operations Directorate), rattaché au Centre Spatial Marshall, devient indépendant, Kurt Debus est nommé directeur du nouveau Centre des Opérations de Lancement (Launch Operations Center) qui deviendra le Centre Spatial Kennedy, une semaine après l’assassinat du 35ème Président des Etats-Unis.

Bien évidemment, différentes corporations et cultures d’entreprises se mêlent au Cap Canaveral, chacune est jalouse de ses prérogatives et fière de son appartenance à un groupe, ce qui, bien évidemment, crée inévitablement des tensions.

Ainsi par exemple les techniciens qui s’occupent du vaisseau spatial (Spacecraft Technicians) et dépendent administrativement du Centre des Vaisseaux Spatiaux Habités*, le font ostensiblement savoir en portant des casques de couleur jaune frappés des lettres MSC (Manned Spacecraft Center) et non des casques blancs.

On y trouve également les personnels des sociétés ayant remporté les appels d’offres lancés par la NASA (les contractants). Le personnel de chez Grumann, une entreprise de la Côte Est, est plutôt extraverti, alors que celui de North American, de la Côte Ouest est majoritairement réservé. Si les premiers ont un problème ils se réunissent et discutent bruyamment, en faisant de grands gestes, en revanche les techniciens de North American penchés les uns vers les autres parlent à voix basse, presque en chuchotant. L’ingénieur en chef de la NASA, en charge du vaisseau spatial, Ted Sasseen, se souvient : « Nous devions courir après Grumman et pousser North American ». Le personnel de Mc Donnell était considéré comme une équipe sérieuse et très efficace. Quant aux personnels de General Electric, ils avaient été imposés par le quartier général de la NASA pour s’assurer, et le cas échéant assurer, la compatibilité électrique entre les nombreuses interfaces fabriquées par des sociétés différentes. Leur rôle, très controversé par les centres de la Nasa et les contractants, fera l’objet d’incessantes modifications. Plutôt mal vus par les autres corporations, on les appelait les « espions ».

D’autres corps de métiers se sont vus affubler de surnoms plus ou moins croustillants.

Ainsi les Inspecteurs Qualité de la NASA sont appelés les grenouilles, car « ils ne servent strictement à rien, ils ne font que manger et (faire) ch… déféquer ».  Les techniciens, sont les « mulets » (poisson), car les ingénieurs opération, les « requins », n’en font qu’une bouchée s’ils commettent une erreur.

Les inspecteurs des firmes contractantes sont les « pélicans »  car les sceaux de cire rouge qu’ils utilisent ressemblent aux déjections de ces oiseaux piscivores.

Les « Tiger Teams » sont composés de spécialistes du centre spatial et des contractants, dont le rôle est de vérifier tous les systèmes d’un vaisseau spatial afin de traquer toute source potentielle de problème et le résoudre.

Quant aux personnels qui travaillent sur le pas de tir à plein temps, on les appelle les « rats du pad ».

Ce brassage des cultures d’entreprises et des traditions,  contraste fortement avec l’image consensuelle d’une organisation du travail ultra-rationnelle, dont se targuait publiquement l’agence spatiale. Comment peut-il en être autrement, en effet, quel que soit le degré de sophistication d’une organisation du travail,  ce dernier est d’abord fait par des Hommes… Imaginatifs, consciencieux, travaillant dur, mais également faillibles et même quelque fois têtus !

* Actuellement le Centre Spatial Johnson.