Les recommandations de Wernher von Braun pour battre les soviétiques dans l’espace

Voici une traduction de la lettre, datée du 26 avril 1961, envoyée par Wernher von Braun à Lyndon Johnson, en réponse au mémorandum adressé par le président Kennedy à son vice-président, le 20 avril.

Wernher von Braun, John F. Kennedy et Lyndon B. Johndon. 11 septembre 1962.

En résumé : pour avoir d’excellentes chances de battre les soviétiques, affirme Wernher von Braun, il faut envoyer des Hommes sur la Lune !

26 avril 1961

Le Vice-Président des Etats-Unis
La Maison Blanche
Washington 25, D.C.

Mon cher M. le Vice-Président,

La présente constitue une tentative de réponse à certaines questions concernant notre programme spatial national, soulevées par le président dans son mémorandum à votre intention, daté du 20 avril 1961. J’aimerais attirer votre attention sur le fait que les commentaires ci-après sont de ma seule responsabilité et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de la NASA, au sein de laquelle j’ai l’honneur de servir.

Question 1.  Pouvons-nous battre les soviétiques en plaçant un laboratoire dans l’espace, ou une mission autour de la Lune, ou par une fusée qui atterrirait sur la Lune, ou avec une fusée qui ferait l’aller-retour autour de la Lune avec un homme. Y a-t-il d’autres programmes spatiaux qui permettraient des résultats spectaculaires et que nous pourrions être les premiers à réaliser ?

Réponse :  Avec leur récent lancement vers Vénus, les soviétiques ont démontré qu’ils possèdent une fusée capable de mettre une charge de 6,5 tonnes en orbite. Lorsque l’on sait que notre capsule Mercury ne pèse que 1,8 tonnes, il apparaît clairement que le lanceur soviétique pourrait être capable :

  • D’envoyer plusieurs astronautes en orbite simultanément. (Une telle capsule, plus spacieuse, pourrait être assimilée, et servir, comme un petit « laboratoire dans l’espace ».
  • Faire atterrir une charge utile substantielle sur la Lune. Mon estimation, est que cette fusée pourrait faire atterrir sur la Lune un objet de 650 kg (Soit un dixième de sa capacité de satellisation en orbite basse). Cette masse est insuffisante pour y inclure une fusée, pour le vol retour vers la Terre d’un Homme que l’on aurait déposé sur la Lune. Mais c’est entièrement suffisant pour une station automatique qui pourrait retransmettre des données sur Terre, et qui serait laissée sur la Lune après sa mission. Une mission similaire est prévue avec notre projet Ranger qui sera lancée par une Atlas-Agena B. La capsule de la sonde Ranger qui doit atterrir sur la Lune a une masse de 135 kg. Le lancement est prévu pour Janvier 1962. (NdT : Missions Ranger Block 2)

Le lanceur soviétique actuel pourrait envoyer autour de la Lune une capsule d’une masse comprise entre 1 800 et 2 300 kg et la faire revenir sur Terre. Masse tout à fait insuffisante pour envoyer un homme autour de la Lune, en y incorporant de quoi lui assurer la capacité d’interrompre la mission ou lui assurer un retour en toute sécurité. Pour la NASA il s’agit de fonctionnalités obligatoires pour toute mission habitée. On ne peut pas négliger la possibilité que les soviétiques s’affranchissent de ces contraintes pour se faciliter la tâche.

Un lanceur environ dix fois plus puissant, que celui utilisé par les russes pour envoyer leur sonde vers Vénus, est nécessaire pour envoyer un homme sur la Lune et le ramener sain et sauf sur Terre. On peut éviter le développement d’une telle super fusée en développant les techniques de rendez-vous et de ravitaillement en carburant en orbite, pour de plus petites fusées. Mais le développement de ces techniques par les soviétiques ne pourrait pas nous être dissimulé, et prendrait sans aucun doute plusieurs années. (Peut-être aussi long, voire plus long, que le développement d’une super fusée pour le vol direct).

En résumé, mon sentiment est que :

  1. Nos chances de battre les russes en mettant sur orbite un laboratoire ne sont pas très bonnes. Les russes ont la capacité de le faire cette année, alors qu’il nous faudra attendre l’année 1964 et la Saturne C-1, mais le nôtre pourrait être plus massif.
  2. Nous avons une chance de battre les soviétiques en faisant atterrir une station automatique sur la Lune. Il est difficile d’affirmer si cet objectif fait partie de leur programme, du strict point de vue du lanceur, ils sont capables de réaliser ce projet dès maintenant. Quant à nous, c’est prévu pour début 1962 avec une Atlas-Agena B et Ranger 3.
  3. Nous avons une bonne chance d’envoyer trois Hommes autour de la Lune avant les russes (1965/1966). Les soviétiques pourraient cependant effectuer un vol circumlunaire plus tôt en faisant l’impasse sur certains aspects de la sécurité et en envoyant qu’une seule personne. J’estime qu’ils peuvent réaliser cela en 1962 ou 1963.
  4. Nous avons une excellente chance de battre les soviétiques en envoyant des Hommes sur la surface de la Lune (avec la possibilité de les ramener bien évidemment). La raison est qu’ils devront accroître la puissance de leur lanceur d’un facteur 10 pour y arriver. Nous n’avons pas de lanceur suffisamment puissant à ce jour, et il est fort peu probable que les soviétiques en possèdent un. C’est la raison pour laquelle, avec un tel objectif, nous ne partirions pas avec des auspices trop défavorables. Avec un programme accéléré je pense que nous pouvons atteindre ce but en 1967 ou 1968.

Question 2. Combien cela coûterait-il en plus de ce que nous dépensons déjà ?

Réponse : Je pense que je ne devrais pas essayer de répondre à cette question avant que les objectifs exacts, et le calendrier pour un programme spatial accéléré aient été déterminés. Toutefois je peux affirmer sans trop me tromper que l’augmentation du financement pour atteindre l’objectif d) ci-dessus, serait bien supérieur à 1 milliard de dollars pour l’année fiscale 1962 et que l’augmentation pour les années fiscales suivantes devra être multiplié par deux voire plus.

Question 3.   Nous consacrons-nous à 100 % sur des programmes existants ? Si non, pourquoi ? Si non pouvez-vous me faire des recommandations sur la manière d’accélérer ces actions.

Réponse : Nous ne travaillons par 24 heures sur 24 sur les programmes existants. Actuellement le travail consacré au programme Saturne se fait sur une base normale, avec une équipe travaillant avec des horaires standards. Il n’y a que quelques secteurs critiques où les heures supplémentaires et plusieurs équipes de travail sont autorisées. Au cours des mois de janvier février et mars 1961, le personnel du centre des vols spatiaux Georges C. Marshall de la NASA, qui a la responsabilité de la totalité du lanceur Saturne, et qui développe le premier étage en tant que projet interne, a travaillé une moyenne de 46 heures par semaine. Ce qui inclut le travail administratif et de bureau. Dans les secteurs critiques du projet Saturne (design, assemblage, inspection et test), le temps de travail moyen pour la même période est de 47,7 heures par semaine avec des pointes individuelles à 54 heures.

L’expérience nous montre que dans la recherche et le développement, travailler plus longtemps ne signifie pas forcément plus de résultats car il faut tenir compte des risques induits par la fatigue. Dans les secteurs critiques sus mentionnés, une deuxième équipe permettrait d’alléger grandement la lourde charge de travail. Toutefois, le budget et les conditions d’accueil de ce personnel supplémentaire ne sont pas disponibles à cette heure. Dans ce secteur toute aide serait la bienvenue.

L’adjonction d’une troisième équipe n’est pas conseillée dans la recherche et le développement. L’expérience issue de l’industrie indique qu’une organisation avec deux équipes, et la possibilité d’effectuer des heures supplémentaires, mais sans excès, produit les meilleurs résultats.

Dans les usines industrielles impliquées dans le programme Saturne, la situation est approximativement la même. Une augmentation du financement autorisant les heures supplémentaires, dans des secteurs névralgiques, permettrait d’accélérer le programme.

Question 4.    Pour construire de puissants lanceurs, devons-nous privilégier le nucléaire, le chimique ou le liquide, ou une combinaison des trois ?

Réponse : De l’avis général des concepteurs de moteurs- fusée, la propulsion nucléaire sera dévolue à l’exploration de l’espace lointain (il s’agira de l’étage supérieur d’une fusée conventionnelle fonctionnant avec du carburant chimique ou bien de vaisseaux spatiaux s’élançant depuis l’orbite terrestre). Il ne s’agira pas d’une fusée (utilisant l’énergie nucléaire) décollant depuis le sol. Qui plus est, la technologie du moteur fusée nucléaire est encore dans sa prime enfance.

La fusée nucléaire pourra être considérée comme une solution prometteuse pour étendre et accroître l’étendue de nos opérations spatiales après les années 1967 ou 1968. Le moteur nucléaire ne doit pas être considéré comme un candidat potentiel à notre problème de fusée puissante en cette année 1961.

L’opinion ci-dessus concerne le plus simple et le plus élémentaire moteur nucléaire c’est-à-dire du type « transfert de chaleur »,  où de l’hydrogène liquide est évaporé puis chauffé à haute température dans un réacteur nucléaire pour être expulsé par la tuyère du moteur.

Il existe également un type de moteur nucléaire radicalement différent que l’on appelle moteur « à ions » ou à « propulsion ionique ». Dans ce cas l’énergie nucléaire est d’abord transformée en énergie électrique qui est utilisée pour expulser des particules ionisées (c.à.d. chargée électriquement) dans le vide de l’espace à des vitesses très importantes. C’est la « force de propulsion » du moteur à ions. Il est dans la nature même de ces systèmes de propulsion nucléaire à ions, qu’il est impossible de les utiliser dans l’atmosphère. Bien que très économique en carburant, ils ne produisent qu’une faible poussée. Aussi ne peut-on en aucun cas les qualifier de lanceurs. Le futur de la propulsion ionique, économe en carburant et de faible poussée, réside dans les voyages interplanétaires.

Concernant les carburants « chimiques ou liquides » la question du Président fait très certainement référence à la comparaison entre les carburants liquides et solides, les deux impliquant des réactions chimiques.

Actuellement nos fusées les plus puissantes (Atlas, premier étage de Titan et premier étage de Saturne) utilisent toutes des ergols liquides, et tout laisse croire que les soviétiques utilisent également les ergols liquides pour leurs missiles intercontinentaux et lancements spatiaux. En ce moment les fusées les plus puissantes utilisant des propergols solides (Nike Zeus, premier étage de Minuteman, premier étage de Polaris) sont substantiellement plus petites et moins puissantes. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que lorsqu’il s’agit de développer des fusées très puissantes, compte tenu de notre expérience actuelle, les systèmes à base d’ergols liquides surclassent largement ceux conçus avec des propergols solides.

Il ne fait aucun doute qu’il soit possible de développer des lanceurs plus puissants et je ne pense pas qu’il faille d’importantes percées technologiques pour ce faire. D’un autre côté il ne faut pas perdre de vue qu’une enveloppe remplie avec du propergol solide auquel on fixe une tuyère est capable de générer une poussée, mais c’est encore loin d’être un lanceur. Et bien que le taux de fiabilité des fusées à propergols solides, en raison de leur simplicité, soit impressionnant et supérieur aux systèmes à ergols liquides, lorsque l’on parle de lanceur, il faut intégrer le système de guidage, les systèmes de contrôle d’attitude, le système de séparation des étages, etc.

Un autre point important est que la puissance d’un moteur fusée ne devrait pas être mesurée en fonction de la poussée brute, mais en termes d’impulsion spécifique, c. à d. le produit de la poussée par rapport à la durée de fonctionnement. Pour plusieurs raisons, il est plus avantageux de ne pas faire fonctionner des moteurs-fusée à propergols solides plus d’une soixantaine de secondes, alors que la plupart des moteurs à ergols liquides ont des temps de fonctionnement de 120 secondes et plus. C’est ainsi qu’un moteur-fusée à propergols solides de 1 350 tonnes de poussée pendant 60 secondes, n’est en réalité pas plus puissant qu’un moteur-fusée à ergols liquides de 675 tonnes de poussée fonctionnant 120 secondes.

Mes recommandations consistent à augmenter substantiellement l’effort et le financement dans le domaine des fusées à propergols solides (de 30 à 50 millions de dollars pour l’année fiscale 1962) avec l’objectif immédiat de :

  • Démontrer la faisabilité de très grosses fusées à propergol solides constitués de segments (le maniement et l’acheminement de fusées de plusieurs centaines de tonnes de poussée est ingérable si une telle fusée n’est pas constituée de plus petits segments que l’on peut assembler directement sur le site de lancement.)
  • Développer des méthodes d’inspection simplifiées qui permettront de s’assurer que de si gigantesques fusées ne présentent pas d’anomalies.
  • Déterminer les méthodes opérationnelles les plus adaptées pour acheminer, manier, assembler, vérifier, et lancer, de très grosses fusées à propergols solides. Ceci implique une série d’études pour répondre à des questions telles que :
  1. Est-ce qu’un groupement de plus petites fusées à propergol solide ou une seule grosse fusée est préférable à des fusées composées de segments ? Une question que l’on ne doit pas analyser uniquement sous l’angle de la puissance, mais du point de vue opérationnel en tenant compte du transport et du travail des équipes au sol…
  2. La sécurité du pas de tir et des alentours. (Comment l’ensemble des opérations du Cap Canaveral seraient impactées par la présence de fusées remplies de milliers de kg de propergols solides).
  3. Evaluer le pour et le contre des différents sites de lancements des fusées à propergols solides ; à l’intérieur des terres, sur le littoral, ou sur des plates-formes en mer.
  4. Les exigences liées aux lancements habités. (Comment arrêter les moteurs du lanceur en cas de problème, pour permettre une interruption de la mission sans risque, et la récupération de la capsule spatiale ? Si cela s’avère difficile, quelles procédures alternatives peuvent être mises en œuvre ?

Question 5. Y consacrons-nous suffisamment d’effort ? Obtenons-nous les résultats nécessaires ?

Réponse : Non je ne pense pas que nous y consacrions suffisamment d’effort.

Selon moi les étapes les plus efficaces pour améliorer notre stature spatiale nationale, et accélérer les choses, seraient de :

  • Déterminer quelques objectifs à atteindre (le moins possible pour plus d’efficacité) dans notre programme spatial et en faire des priorités nationales. (Par exemple : faire atterrir un Homme sur la Lune en 1967 ou 1968).
  • Identifier parmi nos projets spatiaux en cours, ceux qui contribueraient le plus à atteindre cet objectif. (Par exemple : faire atterrir une station automatique sur la Lune qui permettra de déterminer les conditions environnementales que l’Homme y trouvera.)
  • Mettre tous les autres projets de notre programme spatial en veilleuse.
  • Ajouter un lanceur à ergols liquides encore plus puissant à notre programme de lanceurs spatiaux. La conception de ce lanceur devrait autoriser une certaine flexibilité afin de permettre des ajustements au fur et à mesure de l’accroissement de nos connaissances.

Exemple : Développer en plus de ce qui est fait aujourd’hui, un premier étage propulsif à ergols liquides avec une impulsion spécifique deux fois plus élevée que celui du premier étage de la Saturne, conçu pour fonctionner en fagot si besoin.

Avec ce lanceur nous pourrions :

  1. Doubler la capacité de satellisation. La multiplication par deux de la charge utile s’avèrerait primordiale pour faire atterrir des stations automatiques sur la Lune, pour des vols circumlunaires, et pour l’objectif final de faire atterrir des Hommes sur la Lune (si d’ici quelques années la solution des ravitaillements orbitaux s’avérait être la plus prometteuse.)
  2. Assembler un lanceur plus puissant en disposant trois ou quatre propulseurs en fagot. Cette solution devra être utilisée si d’ici quelques années, le rendez-vous et le ravitaillement orbital posaient problème, et que la « route directe » pour un atterrissage humain sur la Lune apparaissait comme la plus réalisable.

Pour résumer, je voudrais dire que dans cette course à l’espace, nous avons à faire à un adversaire déterminé dont l’économie en temps de paix est sur le pied de guerre. La plupart de nos procédures sont conçues hors du cadre de l’urgence nationale. Je ne pense pas que nous puissions gagner cette course, à moins que nous prenions enfin les mesures qui, jusqu’à présent, n’ont été jugées admissibles qu’en période d’urgence nationale.

Respectueusement vôtre,

Wernher von Braun

Le Top 100 des stars de l’aérospatial

Pour le centième anniversaire du premier vol piloté et motorisé de l’Histoire, par les frères Wright, le magazine Aviation Week & Space Technology a imaginé soumettre au vote une liste de 762 noms, compilée par des historiens spécialistes de l’aviation et de l’espace, l’institut américain d’aéronautique et d’astronautique, ainsi que le conseil international des sciences aéronautiques, qui englobe 32 sociétés aérospatiales dans le monde, pour élire le Top 100 des stars du monde aérospatial.

Une biographie succincte accompagne chacun des 762 noms qui sont répartis dans 15 catégories. Le vote réservé exclusivement aux professionnels du monde entier s’est déroulé du 1er février au 30 mars 2003. Le logiciel spécifique pour cette opération a été conçu par IBM et hébergé sur leurs serveurs. Plus d’un million de votes ont été comptabilisés, en provenance de 180 pays.

Le 18 juin 2003,  dans le cadre du Salon du Bourget, Aviation Week a organisé une cérémonie en la Salle Wagram à Paris, afin d’honorer ce Top 100 du secteur aérospatial.

Voici tout d’abord la liste des trois premiers de chacune des 15 catégories :

Les trois premiers de chaque catégorie. Entre parenthèses leur classement général.

Cette liste de 45 personnalités comprend quatre français, trois allemands, un russe, un brésilien, un suisse, un britannique, un italien… et 33 américains…

Lorsque l’on sait qu’en 2003 sur les dix plus grandes entreprises aérospatiales du monde on trouve 6 sociétés américaines, dont 5 aux 6 premières places (la quatrième est britannique), et que la première entreprise russe n’est qu’à la 17è place avec un chiffre d’affaire 34 fois inférieur au n°1 mondial, qui est américain, on « comprend » mieux la sous représentation de ce pays dans le sondage (5 sur 100 !). La septième entreprise aérospatiale du monde était alors française ! (Désormais l’Europe est en deuxième position avec Airbus !)

Voici le Top 100 : (en rouge les trois premiers de chaque catégorie)

  1. Wilbur and Orville Wright
  2. Wernher von Braun
  3. Robert Goddard
  4. Leonard de Vinci
  5. Glenn Curtiss
  6. Charles A. Lindbergh
  7. William L. « Billy » Mitchell
  8. Clarence L. « Kelly » Johnson
  9. Neil A. Armstrong
  10. Daniel Bernoulli
  11. Charles E. « Chuck » Yeager
  12. Otto Lilienthal
  13. Buzz Aldrin
  14. William Boeing
  15. Alan B. Shepard, Jr.
  16. Henry H. « Hap » Arnold
  17. Manfred von Richthofen
  18. Samuel P. Langley
  19. Igor I. Sikorsky
  20. Jules Verne (F)
  21. John K. Northrop
  22. Herb Kelleher
  23. Edward V. « Eddie » Rickenbacker
  24. Jacques-Etienne et Joseph-Michel Montgolfier (F)
  25. Ex-aequo Christopher Kraft / Antoine de Saint-Exupéry (F)
  26. Curtis LeMay
  27. Ernst Mach
  28. Juan Trippe
  29. Elbert « Burt » Rutan
  30. Theodore von Karman
  31. Alberto Santos-Dumont
  32. James Van Allen
  33. Alexander Graham Bell
  34. Ben Rich
  35. Alvin M. « Tex » Johnston
  36. Richard Branson
  37. Youri Gagarine
  38. Octave Chanute
  39. James « Jimmy » H. Doolittle
  40. Alexandre Gustave Eiffel (F)
  41. Robert « Bob » Crandall
  42. Equipage de Challenger – 51-L
  43. Louis Blériot (F)
  44. Donald Douglas
  45. Claire L. Chennault
  46. Will Rogers
  47. James A. Lovell, Jr.
  48. Robert « Bob » Hoover
  49. Ex-aequo Thomas H. Kelly / Clément Ader (F)
  50. Hugh Dryden
  51. Pierre-Georges Latécoère (F)
  52. Ex-aequo Marcel Bloch (Dassault) (F) / Roger Béteille (F)
  53. Virgil I. « Gus » Grissom
  54. Ferdinand von Zeppelin
  55. Jacqueline Auriol (F)
  56. Arthur C. Clarke
  57. Isoroku Yamamoto
  58. Daniel and Harry Guggenheim
  59. Anne Morrow Lindbergh
  60. Robert J. Collier
  61. Gregory « Pappy » Boyington
  62. Elmer Sperry
  63. James « Jimmy » Stewart
  64. Douglas « Wrong Way » Corrigan
  65. Konstantin Tsiolkovsky
  66. Ex-aequo Patricia « Patty » Wagstaff / Frank Whittle
  67. Ex-aequo Carl Sagan / Sergey Korolyov
  68. Albert Boyd
  69. René Leduc (F)
  70. John W. Young
  71. Gene Roddenberry
  72. Valentina Tereshkova
  73. Thomas E. Braniff
  74. Walter C. « Walt » Williams
  75. Jean Mermoz (F)
  76. Henri and Maurice Farman (F)
  77. Paul Poberezny
  78. Jean Bertin (F)
  79. Sally K. Ride
  80. Roland Garros (F)
  81. Osborne Reynolds
  82. Amelia Earhart
  83. Georges Guynemer (F)
  84. G. Wells
  85. Jean-Pierre Haigneré (F)
  86. Ex-aequo James S. McDonnell, Jr. / Robert Esnault-Pelterie (F)
  87. Ex-aequo Allan and Malcom Loughhead (Lockheed) / Marcel Bouilloux-Lafont (F)
  88. Richard Bong
  89. John H. Glenn, Jr.
  90. Ex-aequo James E. Webb / Freddie Laker
  91. Lawrence Sperry
  92. Douglas Bader
  93. Howard Hughes
  94. Willy Messerschmitt
  95. Louis Breguet (F)
  96. William A. Moffett
  97. William « Bull » Halsey
  98. George Mueller
  99. Henri Deutsch de la Meurthe (F)
  100. Boris Petrov

Parmis ces cent noms, 20 français (22 si l’on différencie les frères Montgolfier et Farman), le premier est à la vingtième place : Jules Verne. Le premier russe est à la 37è place. Cherchez l’erreur !

Que Wernher von Braun soit arrivé second sur 762 noms, et premier de la catégorie « concepteurs de fusées », n’est que justice, non seulement pour ses travaux, surtout à Peenemünde, fondamentaux pour la conquête de l’espace, mais également pour son prosélytisme. Grâce à ses très nombreuses conférences, ses articles dans Collier’s, les émissions avec Walt Disney, il a réussi à persuader les américains de la faisabilité du vol spatial, qui n’était alors que de la science-fiction…

Que Serguei Koroliov ex-aequo avec Carl Sagan n’arrive qu’à la 67è place est une flagrante injustice !  Même si Koroliov s’est indéniablement servi des travaux de von Braun et son équipe de Peenemünde, y compris de savants allemands déportés en Union-Soviétique après la deuxième guerre mondiale, il aurait dû figurer dans les 10 premiers, compte tenu de son influence sur le programme spatial soviétique.

Konstantin Tsiolkovski est troisième de sa catégorie mais 65è du classement général… Hermann Oberth brille par son absence ! Un autre illustre absent, Willy Ley !  Vladimir Tchelomeï et Valentin Glouchko auraient également dû figurer dans ce Top 100 ! Ainsi que Erich Warsitz…

Beaucoup de surprises dans ces résultats, à l’époque, pour moi en tout cas. Cela dit, je suis plus spatial qu’aéro !

Le classement des 11 astronautes présents dans la liste des 100 « finalistes » :

  1. Neil A. Armstrong
  2. Buzz Aldrin
  3. Alan B. Shepard, Jr.
  4. Youri Gagarine
  5. Equipage de Challenger (Mission 51-L)
  6. James A. Lovell, Jr.
  7. Virgil I. « Gus » Grissom
  8. John W. Young
  9. Valentina Tereshkova
  10. Sally K. Ride
  11. Jean-Pierre Haigneré

Le problème c’est que les astronautes ont été classés à la fois dans « Héros » et dans « Voyageurs de l’espace » !

Que vient donc faire Jean-Pierre Haigneré dans ce classement alors que par exemple Jean-Loup Chrétien est absent ?  Comment furent classés Walter Schirra et Alexei Leonov ?  Gagarine et Tereshkova ne furent en définitive que de simples passagers « facilement » interchangeables, héros certainement, compte tenu des risques encourus, mais ils n’ont jamais piloté leur capsule spatiale…   Si Neil Armstrong mérite amplement la première place au regard de sa carrière militaire, ses vols sur le X-15 etc., l’équipage de Challenger n’est classé qu’en raison de son sacrifice ultime… Dans ce cas, il aurait fallu mentionner également, Vladimir Komarov, Vladislav Volkov, Victor Patsaïev et Gueorgui Dobrovolski, également décédés lors du déroulement d’une mission spatiale (L’accident de la navette Columbia s’est produit le premier février 2003 après le début des votes) !

Et où est donc passé John Glenn ?

Dans ce classement des astronautes, John Young aurait dû arriver en seconde position au regard de sa carrière (six vols spatiaux, dont une mission sur la surface de la Lune et le premier vol de la navette spatiale) …

Peut-être eût-il fallu distinguer l’aéronautique de l’astronautique ?

Voici le prix décerné aux lauréats ou ayants droit :

Le Club de Presse de la Vitesse de Libération (Escape Velocity Press Club)

Des journalistes qui couvraient le programme spatial américain, et les membres des relations publiques de la NASA avaient créé l’Escape Velocity Press Club un club de presse très privé, que l’on intégrait sur invitation uniquement.

Créé au début du programme Gemini pour circonvenir les lois très surprenantes sur l’alcool, qui ont cours au Texas. Le Club de Presse de la Vitesse de Libération* se réunissait dans les salles de réunion des hôtels de Houston, lors des mission spatiales.

La carte de membre de Fred Cambria, journaliste de CBS, signée par le président du club, James Schefter.

Dans les mois qui ont suivi l’accident d’Apollo 1, sans aucune mission spatiale à couvrir, après la frénésie qui a marqué le programme Gemini, 10 missions en 20 mois ( entre le 23 mars 1965 et le 15 novembre 1966) les journalistes se sont trouvés sans rien à dire, hormis ressasser le tragique accident qui a coûté la vie aux trois astronautes d’Apollo 1.

Le moral de tous est au plus bas. Alan Shepard alors chef du bureau des astronautes, avait déclaré récemment :  « Il est temps d’arrêter de se morfondre. Ça suffit comme ça. Il faut retrouver le moral, et faire en sorte de renvoyer nos culs dans l’espace. »

C’est ainsi que James Schefter, le président du Club, (Journaliste pour le Houston Chronicle et Time-Life, il a couvert le programme spatial de 1963 à 1973) et Robert Button (Chargé des relations publiques de la NASA, affecté au bureau des astronautes) vont voir Shepard, pour lui proposer une idée.

Ils souhaitent organiser un gala en l’honneur du sixième anniversaire de son vol Mercury. il s’agit là du parfait prétexte pour faire la fête. Bien que n’appréciant pas particulièrement la presse, Shepard reconnut immédiatement le bien fondé d’associer son nom, à un événement susceptible de motiver une communauté qui avait clairement le cafard…

Alan Shepard fait un discours (devant lui, un sac de charbon de bois de la marque Royal Oak). Une petite blague à ses dépens…

Le gala se tint le samedi 6 mai 1967 dans la salle de bal de l’Hôtel Nassau Bay, juste en face de l’entrée principale du centre des vols spatiaux habités. Plus de 500 personnes voulurent y assister, alors que la salle ne pouvait en contenir que 300. Les choix furent parfois douloureux…

Jim Schefter fit office de maître de cérémonie. Il y avait notamment Robert Gilruth, le directeur du centre des vols spatiaux habités, Wernher von Braun le directeur du centre spatial Marshall, les six astronautes Mercury, les veuves des astronautes d’Apollo 1 Betty Grissom, Patricia White et Martha Chaffee…

C’est lors de ce gala que fut projeté le film humoristique concocté notamment par Walter Schirra, intitulé : « Astronaut Hero, or, How To Succeed In Business Without Really Flying…Much.« , qui se moquait gentiment de l’invité d’honneur, Alan Shepard.

(De g. à d.) Richard Gordon, Charles Conrad, John Young, Thomas Stafford forment le groupe « The Fearsome Foursome » (Le redoutable quatuor). Parodiant deux chansons de Broadway avec des paroles réécrites à la « gloire » de Shepard…
Betty Grissom debout, à gauche Robert Button, debout également Wernher von Braun, de dos, Paul Haney.
Wernher von Braun, au fond à droite John Glenn.

Ce gala s’avèrera être une parfaite réussite, l’événement social de l’année, de nature à redonner de l’énergie et de l’enthousiasme à tout le monde. Il était temps de se remettre au travail afin d’atteindre l’objectif du président Kennedy… Ce sera chose faite deux ans plus tard !

* La vitesse de libération est la vitesse minimale que doit atteindre un objet pour échapper définitivement à l’attraction gravitationnelle d’un astre et s’en éloigner indéfiniment.