Voici une traduction, par votre serviteur, de fameux mémorandum de James Webb concernant l’affaire du premier badge de mission… (Une lecture entre les lignes laisse entrevoir pas mal de choses !)
14 août 1965
MEMORANDUM pour: Mr. Donald K. Slayton, MSC, Houston, Texas
Comme convenu à Houston, la question des badges ou écussons d’identification que Cooper et Conrad souhaitent porter pour Gemini 5 a été longuement examinée. Gilruth, Mueller, Dryden, Seamans et moi-même avons donné notre accord assorti des conditions suivantes :
- Pour GT-5 et les futures missions Gemini, cette identification devra être portée au niveau droit du torse, juste sous le nom de l’astronaute, ledit badge ne devra pas être plus grand que le logo de la NASA porté à gauche. Désormais ce badge sera désigné par le terme générique de « badge Cooper ». Si un tel « badge Cooper » ne devait plus être porté, les mentions « Gemini 6 » ou « Gemini 7 » seront ajoutés sous le nom de l’astronaute.
- Pour GT-5 le « badge Cooper » sera celui qui a été proposé, exception faite que sa taille devra être en accord avec le paragraphe 1 ci-dessus ; à moins qu’il soit impossible d’en refaire faire à temps, et il doit être porté sur la combinaison à l’endroit précisé ci-dessus.
- Pour les vols subséquents, le commandant de la mission ou le pilote seront autorisés à concevoir ou faire concevoir un « badge Cooper » pour leur vol, qui devra être validé au préalable par le Directeur du Centre des Vaisseaux Spatiaux Habités et par l’administrateur adjoint pour les vols spatiaux. Jusqu’à plus ample informé, l’administrateur adjoint en charge des vols spatiaux habités, avant accord définitif, soumettra le badge à l’Administrateur pour approbation.
- Des règles pour les vols suivants seront édictées par le Directeur du Centre des Vaisseaux Spatiaux Habités
Bien que la décision prise ci-avant l’ait été en raison de l’insistance personnelle de Cooper à mon égard, je dois avouer que j’ai une certaine inquiétude, liée au fait que cette requête m’ait été présentée si tardivement et que les sujets les plus urgents et les plus importants concernant le programme Gemini semblent être liés à une telle considération morale présentée au tout dernier moment. Je crois qu’il est de votre responsabilité d’éviter cela à l’avenir.
Lorsque nous devons faire face à des sujets qui affectent la façon dont les pays étrangers et les autres nationalités peuvent percevoir nos faits et gestes, nous ne pouvons pas laisser à l’équipage seul la responsabilité de ces décisions. Nous devons faire abstraction de leur velléité d’individualité. Dans le cas qui nous occupe, le Dr Gilruth et moi-même avons de très fortes réticences concernant la devise « huit jours ou c’est le fiasco ». Je souhaiterais en conséquence qu’elle soit supprimée. Si le vol ne dure pas 8 jours, nombreux sont ceux qui diront que c’est un échec. Qui plus est, indépendamment du fait que la mission dure 8 jours ou non, la manière dont cette phrase sera traduite dans certains pays étrangers est potentiellement susceptible de porter atteinte à l’image des Etats-Unis.
Comme je l’ai expliqué à Cooper, il est réellement dans mes intentions d’être à l’écoute des desiderata, même personnels, de chacun des sept premiers astronautes. A chacun d’eux, comme à ceux qui furent de vrais pionniers, nous nous efforcerons de prêter une oreille bienveillante et attentive, quelle que soit la demande, et nous leur laisserons toujours le bénéfice du moindre doute. Je pense toutefois, qu’ils doivent, ainsi que tous les astronautes, apprendre à avoir le même respect envers les hauts responsables de cette agence, qui sont tenus d’avoir, sur ce type de sujet, une vision beaucoup plus globale que la leur.
James E. Webb
Administrateur