Zond 5 crée la panique

En 2006, sur les ondes de la radio « The Voice of Russia » (Radio Spoutnik depuis le 10 novembre 2014) le cosmonaute Pavel Popovich (1930-2009) rapporte cette anecdote sur la mission Zond 5 :

« A la fin des années 60 nous nous préparions à effectuer une mission autour de la Lune. A ce moment-là nous envoyions les dénommées Zond, en réalité des répliques du vaisseaux Soyouz mais sans cosmonautes à bord.

Chacune de ces sondes devait passer derrière la Lune et revenir vers notre Terre. Le problème crucial rencontré par ces sondes était l’atterrissage. De toutes les sondes lancées, une seule réalisa un atterrissage nominal. Lorsque nous réalisâmes que nous n’irions jamais vers la Lune, nous décidâmes de monter un petit canular.

Nous demandâmes à nos ingénieurs de raccorder le récepteur radio de la sonde à un émetteur. Les vols lunaires étaient alors suivis par un centre de contrôle se trouvant à Eupatoria en Crimée. Alors que la sonde [ Zond 5, septembre 1969 ]* – s’apprêtait à contourner la Lune, je me trouvais au centre de contrôle, aussi ai-je pris le micro et annoncé : « Le vol se déroule comme prévu, nous approchons de la surface… »

Quelques secondes plus tard, mon appel – comme s’il avait été émis depuis l’espace – fut reçu sur Terre, y compris par les américains. Le conseiller américain pour l’espace, Frank Borman, reçu un appel du Président Nixon qui lui demanda : « Comment se fait-il que Popovich parle depuis la Lune ? ».

Ma blague a provoqué une véritable panique.  

Environ un mois plus tard Frank est venu en URSS et je fus chargé de l’accueillir à l’aéroport. Il était à peine sorti de l’avion qu’il brandit son poing et me dit : « Eh, espèce de délinquant spatial ! »

* Cette précision est apportée par Colin Burgess et Rex Hall dans leur ouvrage : « The First Soviet Cosmonaut Team » paru en 2009 (page 318) qui mentionne également cette anecdote.

L’anecdote rapportée par Pavel Popovich est croustillante, mais comporte quelques erreurs de chronologie…

Contrairement à ce qu’affirment les auteurs du livre sus-cité, Zond 5 n’a pas été lancée en septembre 1969 mais un an plus tôt, en septembre 1968 (la mission s’est déroulée du 15 au 21 septembre 1968).

Il se trouve qu’à cette date Richard Nixon n’est pas encore Président des Etats-Unis, il ne le deviendra que le 20 janvier 1969 (Il est élu le 5 novembre 1968) et Frank Borman n’est pas encore son conseiller spécial pour les affaires spatiales. Le premier est encore en campagne électorale, le second prépare Apollo 8 !

Popovich précise qu’environ un mois après cette « blague » il accueille Frank Borman en URSS… Pas tout à fait, puisque le tout premier voyage de Borman en Union Soviétique n’intervient qu’en juillet 1969, 9 mois après les « faits ».

Du 2 au 11 juillet 1969 Frank Borman, sa femme Susan, et leur deux fils Edwin et Frederick visitent l’Union Soviétique pour la toute première fois, sur invitation de l’ambassadeur Anatoly Dobrynin qu’il avait rencontré en janvier.

Borman est le tout premier astronaute à faire ce voyage. Un véritable événement qui donnera même lieu à une conférence de presse à son retour, le 12 juillet 1969, soit 4 jours avant le lancement d’Apollo 11 !

En réalité, c’est un radiotélescope de l’observatoire de Jodrell Bank en Angleterre, qui intercepte dans le nuit du 18 au 19 septembre 1968 une conversation entre les cosmonautes Pavel Popovich et Vitali Sevastianov (qui font partie des quatre équipages affectés au programme lunaire L1), supposément à bord de Zond 5, et le centre de contrôle des vols d’Eupatoria en Crimée**.

Très vite la NASA se rend compte que l’origine de la transmission est « terrestre » et qu’il s’agit vraissemblablement d’un test du système de communication !  

Bien que Zond 5 emporta végétaux et animaux, il n’y avait aucun spécimen du genre Homo sovieticus à bord !

Pavel Popovich et Frank Borman – Juillet 1969

**Le six juillet 1969 Frank Borman visite le centre de contrôle d’Eupatoria.

John Young, premier du groupe 2 dans l’espace

A la mi-1963 Deke Slayton annonce qu’ Alan Shepard et Thomas Stafford effectueront le premier vol habité du programme Gemini, avec Virgil Grissom et Frank Borman comme doublures.

Cette affectation fut rapidement bouleversée, en raison des ennuis de santé de Shepard, victime de la maladie de Ménière. Une affection de l’oreille interne, qui provoque notamment des crises de vertige giratoire, des acouphènes, et une hypoacousie. Shepard Interdit de vol, c’est  tout naturellement l’équipage suppléant qui est désigné pour cette mission Gemini III.

Peu après, Grissom appelle Borman pour lui demander de passer chez lui pour discuter. Borman accepte volontiers, l’entretien dure environ 1 heure.  Il ne saura jamais pourquoi, mais quelques temps plus tard on lui annonce qu’en définitive il ne volera pas sur Gemini III mais est nommé  commandant  de réserve sur Gemini IV. 

Grissom a préféré John Young , avec lequel il a sympathisé au cours d’un stage de survie dans la jungle du Panama. Ils étaient en binômes !

Le 13 avril 1964 cette affectation est rendue publique par Robert Gilruth. Les doublures de Virgil Grissom et John Young seront Walter Schirra et Thomas Stafford .

Voilà par quel concours de circonstances John Young fut le premier astronaute du groupe 2 à aller dans l’espace…

Il sera également le dernier du groupe 2 à aller dans l’espace !

 

Une conférence de presse en toute décontraction

La conférence de presse d’avant vol, de la mission Gemini 4, s’est déroulée en présence de James McDivitt et Edward White, « équipage titulaire » et James Lovell et Franck Borman, « équipage de réserve ».

Lorsqu’un journaliste demande s’ils ont choisi un nom pour leur vaisseau spatial, James McDivitt répond: “Je ne sais pas, qu’est-ce qu’on joue à Broadway en ce moment ?” Un clin d’œil à Virgil Grissom, qui avait baptisé Gemini 3 “Molly Brown”, d’après la comédie musicale “The Unsinkable Molly Brown” qui passait à Broadway.

A la question de savoir si l’équipage s’entend bien il répond : « Je pense que j’ai passé plus de temps avec Ed depuis le 1er septembre qu’avec ma femme, on s’entend parfaitement, mais pour ces deux-là » désignant Jim Lovell et Frank Borman, « j’ai des doutes ».

Borman : « Nous formons un excellent groupe, d’ailleurs la nuit dernière Jim et moi avons eu un problème avec nos réservations, du coup nous avons dû passer la nuit ensemble dans la suite nuptiale du Georgetown Inn ».

Lovell : « Vous voyez, on ne peut pas être plus proche ! »

Toute la conférence de presse s’est déroulée ainsi.